vendredi 23 janvier 2015
"Le menteur d'Ombrie" - Bjarne Reuter
Del Diavolo Lacrima, promesse d'une vie éternelle, le désir ultime.
Bjarne Reuter lauréat de nombreux prix littéraires, est aujourd'hui considéré comme l'un des plus grands noms de la littérature danoise. Preuve en est faite du très ecclésiastique "Menteur d'Ombrie". En effet, Reuter nous conte, là, dans un style haut en couleurs, l'histoire de Giuseppe Pagamino, parti à la recherche d'un précieux ingrédient, la larme du diable, indispensable au secret de la vie éternelle.
Mais, dure réalité, en ce beau milieu du XIXème siècle où il prétend avoir beaucoup voyagé dans une Ombrie ravagée par la peste, Giuseppe fut avant tout un fossoyeur de tombes, voleur à ses heures perdues. Affabulateur, il l'est, d'où le titre de l'ouvrage.
Notons que l'ouvrage est librement et volontairement inspiré du Décameron de Boccace et ça a là toute son importance: ainsi, ce Décameron dépeint la vie et moeurs de jeunes gens s'interrogeant sur les vices humains et les valeurs morales, au lendemain de la grande peste de Florence. Sujet et cadre spatio-temporel que Reuter reprendra subtilement dans son récit. Par ailleurs, la peste relie thématiquement les deux ouvrages.
Dans une perspective plus littéraire, nous ne serons pas déçus par la plume de l'auteur, tant au niveau des descriptions que par sont style su particulier, un véritable don pour raconter les histoires.
De plus, d'une manière générale, les principales catégories sociales de l'époque et les ingrédients romanesques sont tous, ou presque, au rendez-vous: histoires de vie bien entendu, mais aussi religion et clergé, amours et mariage, assassinats et morts,...
Bien que le récit soir prétexte à une énième histoire amoureuse, le roman se distingue de par la richesse et la complexité relationnelle des protagonistes. Amateurs d'histoires à l'eau de rose, passez votre chemin donc!
Nous retiendrons tout particulièrement une certaine ironie présente, notamment, via la traduction française du nom même de Pagamino - Païen, indice de son étrange destinée - ainsi qu'au travers de personnages plus sombres, comme un certain évêque qui, au final, se révélera tout autre qu'il ne l'aurait jamais imaginé. La fin constituera ainsi en un renversement acerbe de situation, laissant le lecteur particulièrement rêveur.
Quoique le romain soit essentiellement écrit sous forme de dialogues qui prennent de temps à autre l'allure d'un véritable conflit entre la bonne et mauvaise conscience du héros, l'on y retrouve de nombreuses métaphores et remarques percutantes. De plus, certains adages éculés ne conservent pas moins leur pertinence et leur beauté: "La mort a sûrement été créée pour nous rappeler la beauté de la vie" ou encore, "Le jour qui disparaît maintenant ne reviendra jamais, c'est pourquoi il est si précieux".
S'en dégage l'impression d'une lecture riche, percutante, et non dépourvue d'un certain réalisme, une lecture dont on ne peut sortir indemne.Humain et poignant.
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